Île de La Réunion, Océan Indien…

Le soleil, la mer, le lagon, le volcan, les cirques... mais pas seulement !
Présentation de notre académie en juin 2011

1. Le contexte géographique, social et économique local

Île volcanique composée de 2 massifs juxtaposés, avec un volcan toujours en activité, la Réunion, 2500 km², ne compte que 40 km de cotes de sable blanc le long des lagons ou noir le long des plaines alluviales. Au nord, à l’est et au sud en partie, les côtes sont rocheuses et il n’existe pas de plateforme maritime. L’île compte 817 000 habitants au 01/01/2009, avec une prévision de plus d’1 million en 2030. La population réunionnaise est jeune : 35% des Réunionnais ont moins de 20 ans, (la proportion de moins de 20 ans est de 25% en métropole), 42% moins de 25 ans et 7,3% plus de 65 ans. La pyramide des âges réunionnaise se distingue ainsi de la pyramide des âges nationale par une base plus large ; en revanche, elle est plus étroite sur la tranche des 20 à 40 ans, du fait des migrations de jeunes, qui quittent l’île pour poursuivre leurs études ou démarrer leur vie professionnelle hors du département.

La situation de l’emploi est marquée par un fort taux de chômage : moins de la moitié de la population en âge de travailler occupe effectivement un emploi (taux d’emploi des 15-64 ans en 2009 : 43,9%) Le taux d’activité est faible, tout particulièrement celui des jeunes et des femmes qui ont tendance à se retirer du marché du travail. Le taux de chômage – qui avait un peu baissé ces dernières années – est de 29%, en hausse depuis 2004 ; il est de 55,3 % chez les jeunes de 15 à 24 ans (il s’agit des jeunes qui ne sont plus scolarisés ou étudiants [1] ). La part des ménages imposés à la réunion est de 33,5 % contre 63% en métropole et 140 000 personnes perçoivent au moins un des minima sociaux, dont plus de 90 000 le RSA.

L’économie réunionnaise est caractérisée par la faiblesse des activités de production. La taille réduite du marché local et sa perméabilité met la production locale en concurrence avec les importations. Les activités de production ne fournissent que le quart des emplois, ce qui explique à la fois l’étroitesse du marché du travail et la part relativement élevée, par rapport à la France métropolitaine, de la fonction publique, du commerce et de la construction.

2. Juin 2011 : La problématique éducative à la Réunion

Là encore quelques chiffres :

  • À la rentrée 2010, on comptait 241 000 élèves et étudiants de la maternelle à l’université ;

Plus de 120 500 élèves en primaire , 61 000 en collège et SEGPA, 23 900 en lycée général et technologique , 16 500 en lycée professionnel , et 16 500 étudiants (BTS, Université y compris IUFM). Pour l’élémentaire, le nombre d’enfants de 2 ans scolarisés en maternelles est de 5% contre 8% en métropole et pour le primaire les résultats des évaluations en CM2 sont révélatrices.

  • Les personnels :

22 600 personnels dont 15 000 enseignants (public 96% et privé 4%), soit 10% de la population active ayant un emploi (6% en métropole). 18 600 sont titulaires de la fonction publique, et plus de 3000 sont non-titulaires (dont plus de 2000 assistants d’éducation).

  • Les performances scolaires :

Évaluations CM2 2008 réalisées en janvier 2009
En Français : 40 % des élèves sont en difficulté avec des acquis fragiles ou insuffisants, contre 25 % au plan national.
En Mathématiques : 54% des élèves sont en difficulté avec des acquis fragiles ou insuffisants, contre 35 % au plan national.

Si aux différents bacs généraux, technologiques ou professionnels, les résultats de la Réunion se rapprochent de ceux de la métropole, seulement 56,8% d’une génération (contre 65,8% en métropole) accèdent au bac en 2009.

Un chiffre qui reste préoccupant est celui des sorties du système de formation initiale sans qualification ni diplôme : en 2007, 1700 jeunes, soit 12% contre 8% en métropole (un des objectifs du projet stratégique de l’académie 2008-2011 était de réduire de moitié ce chiffre).

Un autre est celui obtenu lors de la Journée d’Appel à la Préparation Défense (J.A.P.D.) de 2008 à l’issue des tests auxquels sont soumis les jeunes garçons et filles âgés de 17 à 19 ans qui ont pour objectif de mesurer leurs compétences face à la lecture Le taux de ceux repérés en situation d’illettrisme s’élève à environ 22 % à la Réunion. Il y a cependant lieu de s’interroger sur cette évaluation. Le chiffre d’adultes illettrés à la Réunion est de 110 000 personnes (et ce depuis des années) on peut aussi s’interroger sur ce chiffre.

Une situation qui montre les progrès faits mais aussi ceux qui restent à faire pour, ne fut-ce que rattraper la situation en métropole et donner à des jeunes, dont beaucoup devront expérimenter la mobilité, un bagage suffisant pour que cette mobilité se fasse dans les meilleures conditions possibles, et pour ceux qui resteront ou reviendront, leur permettre d’occuper les postes disponibles à la Réunion à tous les niveaux, y compris d’encadrement.

Or les écarts de réussite scolaire sont considérables dans un contexte social difficile ; les chiffres précités le montrent ; il faudrait donc renforcer encore le système éducatif pour lui donner les moyens de prendre en charge la difficulté scolaire et ce dès le début de la scolarisation , il faudrait prendre réellement en compte le problème de diglossie qui pénalise certains enfants dès l’entrée à l’école et qui les rend souvent mutiques ou alors en rejet de cette école qu’ils ne comprennent pas toujours ,il faudrait rendre confiance aux élèves dans leur possibilités en valorisant leurs compétences et en leur permettant d’en acquérir de nouvelles ; il faudrait en un mot que l’école républicaine soit garante de l’égalité des chances et qu’elle joue son rôle d’ascenseur social. À la Réunion, elle l’a fait et bien des enseignants d’aujourd’hui en sont la preuve, elle le fait toujours en partie mais elle ne le fait pas ou plus assez.

En cause, et cela nous le partageons avec la métropole, les suppressions de postes ; 196 suppressions cette année, alors que les effectifs ne vont quasiment pas diminuer.

Les établissements le plus touchés sont les lycées professionnels, en raison de la réforme des bacs en 3 ans.

Jusque dans les années 80, le « primaire-professionnel » prédominait à La Réunion. A partir de 1984 (création de l’académie) on a assisté à une « explosion » du second cycle du second degré (notamment second cycles des lycées généraux et technologiques). Après la 3ème, le flux d’orientation vers le second cycle professionnel reste plus important qu’en métropole (écart de près de 10 points), mais les capacités d’accueil ont été élargies raisonnablement (les familles réunionnaises restent attachées à l’enseignement professionnel). Aujourd’hui les ratios (nb de candidats/nb de places) sont de 1,2 pour les CAP et 1,1 pour l’admission en seconde pro. 82% des candidats au CAP et 87% des candidats au bac pro. Sont admis sur leur 1er vœu ! Bien entendu certaines spécialités restent très demandées d’où un certain nombre d’affectations « par défaut » sur les vœux 2 ou 3. L’alignement sur les normes métropolitaines constitue le leitmotiv de la politique académique depuis des années. Ainsi le taux de réussite au bac a-t-il été supérieur au taux métropolitain en 2010 ! Mais comme on vient de le voir ci-dessus la proportion d’élèves admis en 2de GT est bien moindre qu’en métropole (ceci explique cela). Des écarts de scolarisation restent encore significatifs au niveau des sorties sans qualification. Sur ces point la réduction des écarts visée par le projet stratégique de l’académie 2008-2010 était ambitieux (réduction de moitié).

L’élémentaire est durement touché aussi cette année avec 75 postes supprimés ; Là où le ministère devrait avoir une politique volontariste et ambitieuse pour que nous puissions réduire les écarts aux évaluations de CM2, et prendre en charge la remédiation pour les élèves en difficulté (soit 1 élève sur 2) ; les 2 heures d’accompagnement éducatif ne peuvent être profitables dans ces conditions.

Le Sgen-CFDT Réunion a combattu avec détermination la suppression des dispositifs existants permettant la prise en charge de la difficulté scolaire. Ce fut le cas notamment des « 6èmes contrats » qui avaient fait la preuve de leur efficacité. Or celles-ci furent fermées sans qu’aucune évaluation du dispositif ne fut faite ! Nous nous sommes également battus pour le maintien des RASED ; 49 postes ont été rendus ; cette année ce sont les postes de conseillers pédagogiques qui sont supprimés ! Enfin comme dans le second degré l’année dernière, les PE reçus cette année seront affectés sur poste au lieu d’être affectés en surnombre dans les écoles (et ceci, sans formation, comme ailleurs sur le territoire de la République…).

Dans les collèges, si la situation s’est améliorée depuis quelques années, le taux de réussite au brevet – si tant est qu’il soit révélateur ! – est plus bas qu’en métropole mais surtout plus d’un élève sur deux ne possède pas les prérequis pour entrer en seconde générale et technologique. Les effectifs importants des classes ne permettent pas la mise en place dans de bonnes conditions des PPRE, – ce que permettaient les classes contrats ! – Seuls les établissements classés en RAR bénéficient de personnels et moyens supplémentaires, ce qui leur permet le travail en groupes de besoins et en soutien individualisé. A la Réunion, nous en sommes encore aux balbutiements du socle commun des compétences et nous allons expérimenter pour la première fois dans de nombreux collèges le livret de compétences ; de même, organisée en urgence, l’histoire des arts.

Un satisfecit dans les lycées : il semblerait que la mise en place des enseignements d’exploration se soit mieux passée que certains ne l’avaient craint. Cependant, comme en métropole, en classe de première, les TPE sont souvent prétexte à continuer le cours et le tutorat peine à trouver ses marques ; seulement 350 lycéens volontaires à ce jour mais pratiquement autant de tuteurs volontaires !

Les suppressions de postes ont également des conséquences sur le personnel enseignant :

D’abord la dégradation des conditions de travail – effectifs trop lourds, heures supplémentaires, missions de plus en plus nombreuses (par exemple missions transférées aux enseignants dans le cadre de l’orientation avec la mise en oeuvre du PDMF [2]. ) ; donc alourdissement de la charge de travail.

Les effectifs de personnels titulaires étant en diminution, les établissements doivent recourir à des personnels en contrat précaire, mais sur moins d’heures.

Ensuite, il y a les enseignants qui subissent des mesures de carte scolaire et ceux qui doivent assurer des compléments de service sur plusieurs établissements.

Le mouvement 2011 s’annonce donc encore plus difficile que l’an dernier avec les suppressions de poste annoncées dans l’académie, les mesures de carte scolaire, les retours de néo-titulaires originaires et les affectations des stagiaires 15 H qui vont d’ailleurs passer à 18h à cette rentrée. Rappelons que le SGEN REUNION reste résolument attaché aux 1000 points d’originaire des DOM qui favorisent un retour au pays à compétence égale des DOMIENS qui ont passé les concours, une déclinaison acceptable de la notion de recrutement local chère à l’UIR-CFDT, que nous envient certains camarades du privé.

Et pour gérer ce mouvement mais aussi assurer le fonctionnement de l’académie le rectorat se voir amputé de 5 postes d’administratifs (prélevés sur les CIO et transférés aux collèges !). « Il faut », nous a expliqué le Recteur d’académie lors d’une audience « que La Réunion participe à l’effort national et rende aussi des postes » !

Rythmes scolaires :

Nous profitons de cette tribune pour rappeler qu’une des revendications spécifiques du Sgen-CFDT Réunion est la prise en compte de la situation géographique de l’ile : La Réunion est située dans l’hémisphère sud et les saisons y sont inverses par rapport à l’hémisphère nord ! L’activité économique de l’île s’arrête en grande partie à la saison des pluies (en été austral), saison dite chaude et qui correspond à la saison cyclonique. Les vacances d’été – 6 semaines de mi-décembre à fin janvier – sont une coupure, à notre sens, préjudiciable aux apprentissages des élèves. Nous proposons systématiquement tous les 3 ans la mise en place d’un calendrier climatique comme dans les autres régions australes.

Certes le « soleil » n’est pas au rendez vous dans cette aperçu de la situation, mais nous restons résolument optimistes car nous avons aussi et surtout des points positifs : le dynamisme, l’énergie, la gentillesse et la bonne volonté des jeunes qui nous sont confiés, d’où notre obligation de ne pas les décevoir. La conviction de faire un métier passionnant et pour lequel nous nous passionnons. La certitude que rien n’est joué et que le travail et les luttes syndicales contribueront à faire de l’éducation la préoccupation première des Français, espérons-le ! La mobilisation des parents d’élèves semble l’augurer…


[1] En 2010, l’INSEE Réunion a sorti une note sur l’emploi des « jeunes » de 16 à… 34ans !

[2] Cf. la redéfinition des missions des COP (décret en cours)